Dades,espace humain et géographique
Dades, espace humain et géographique -
La vallée du Dadès s'étend le long de la rivière Dadès, entre le Haut-Atlas et l'Anti-Atlas. La partie en amont de la ville de Boumalne,correspond à la zone montagneuse et se présente sous la forme d'une vallée très étroite : les gorges du Dadès. La partie en aval est plus large et atteint deux kilomètres à certains endroits.
Il s'agit d'une zone saharienne de moyenne montagne. Le climat est de type semi-aride, la pluviométrie moyenne est de l'ordre de 150mm. La température moyenne est de 16°C avec des minima qui atteignent –5.7 et des maxima de 40°C. La vallée est un poumon de verdure dans un décor totalement minéral. C'est aussi un havre de fraîcheur l'été, en comparaison avec la chaleur ambiante!
Cette vallée est densément peuplée, avec une concentration très importante de villages le long de la rivière. Ils se touchent les uns les autres sur des dizaines de kilomètres! La population est d'environ 200.000 personnes dans la vallée et compte 35.000 exploitations agricoles. 85% de la population vit en milieu rural et le taux d'accroissement moyen est de 2%. Les moins de vingt ans sont ainsi très nombreux : 56% de la population.
Commune Population en 1994 Population en 2004 taux d'accroissement
Boumalne 9908 ha 11179 ha 1,2%
S Lkhmiss 15719 ha 16387 ha 0.4%
Ait Youl 3972 ha 4466 ha 1.2%
AIT SEDRATE N 3607 ha 4059 ha 1.2%
Ait Sedrate S 4069 ha 4471 ha 0.9%
M'smrir 5593 ha 8107 ha 3.3%
Ikniouen 13672 ha 15738 ha 1.4%
Agriculture et élevage constituent traditionnellement la principale activité de la population. Un vieil adage de la région dit que "la vie repose sur deux éléments fondamentaux : la houe (aguelzim) et la brebis (tili)". A défaut de l'un ou de l'autre, l'homme est traditionnellement livré à la misère. Toutefois, on assiste dans la région à un fort développement de la maçonnerie, de l'artisanat et du commerce, sous l'impulsion de l'apport financier, mais aussi culturel, des ouvriers émigrés en Europe. Ainsi, le béton commence à concurrencer sérieusement la construction traditionnelle en pisé (terre séchée mélangée de paille), qui a pourtant tous les avantages en matière de prix, d'isolation et de rendu esthétique...
Les terres cultivées sont morcelées en parcelles très petites, comparables à des jardins. De plus, les exploitations comptent un grand nombre de parcelles (en moyenne 9 par exploitation), souvent dispersées. Cette caractéristique est le principal frein au développement de la mécanisation agricole et explique le faible rendement de certaines cultures. Le travail de la terre est effectué au moyen d'outils traditionnels : l'araire tirée par les mulets et la houe. La terre est enrichie essentiellement en fumier car l'utilisation d'engrais est une pratique encore peu répandue.
Les parcelles sont souvent séparées par des arbres fruitiers ou des rosiers et elles sont irriguées à l'aide de petits canaux de déviation. Traditionnellement, les produits de l'agriculture familiale sont destinés à alimenter une quinzaine de personnes et autant d'animaux. La plupart des agriculteurs (90%) sont propriétaires des terres qu'ils travaillent. Mais les terres sont inégalement réparties : 4% d'entre eux disposent de 37% des terres, contre 63% qui n'en ont que 26%. Ce manque de terres cultivables chez certaines familles allié à une forte poussée démographique et à un fort chômage sont les raisons d'un important exode rural qui se poursuit dans la région.
Les femmes sont, sur l'année, les principales actrices de l'agriculture. En effet, ce sont elles qui désherbent à la main, qui ramassent les récoltes. Les enfants irriguent les terres. Quant aux hommes, ils viennent donner un coup de main lorsqu'il s'agit de semer et de conduire les bêtes pour labourer.
L'eau constitue le principal problème dans la région, surtout depuis les trois dernières années, marquées par une sécheresse prolongée. La distribution de l'eau est rationnée et s'effectue suivant des droits anciennement établis. En amont de Boumalne, chaque village connaît ses journées de droit, mais il y a une certaine tolérance dans le tour d'utilisation du fait que l'eau est abondante. En aval, où se trouve l'essentiel des terres cultivables, l'eau est insuffisante et l'on constate une certaine rigueur dans la distribution de l'eau. Le réseau d'irrigation est un réseau traditionnel, constitué de très longues canaux (targa) en terre. Toutefois les canaux principaux sont de plus en plus souvent en béton. Quant au pompage, il est quasiment inexistant, mais tend à se développer car il présente l'avantage de fournir de l'eau à toute saison.
L'agriculture dans la région est suivie de près par les techniciens de l'Office Régional de Mise en Valeur Agricole (ORMVA), qui ont suivi des études poussées en agriculture et en gestion. Ils conseillent les agriculteurs, les encouragent à appliquer une agriculture moderne et à prendre en compte le facteur économique dans leurs décisions.
Cependant, ces derniers sont réticents à modifier leurs habitudes dans le choix des cultures, des semences et des engrais. De plus, à Boumalne, du fait que la plupart des familles reçoivent un apport financier de l'un de leur membre immigré en Europe, le rapport à la terre s'est distendu. La terre a perdu son caractère quasi-sacré: des terrains sont laissés en friche et certains n' hésitent pas à se servir sur les terres des autres.
En amont de Boumalne, par contre, les agriculteurs sont bien décidés à suivre les conseils des techniciens et à se faire de l'argent, en investissant dans les pommiers notamment. Le problème, c'est qu'il n'existe pas de coopérative dans la région, qui leur assurerait des prix décents à la vente sur les marchés des grandes villes. Leur production est donc écoulée à un prix ridicule au souk local. "Il manque une véritable volonté de la part des agriculteurs de travailler ensemble ", me confie Hassan, technicien à l'ORMVA. "Si l'ORMVA monte tout seul la coopérative, ce sera un échec", m'assure-t-il. A part la coopérative de transformation de roses déjà existante, les projets de coopératives proposés par l'ORMVA aux agriculteurs au début des années 90 (coopérative laitière, coopérative fruitière...) sont restés dans les cartons. Le lait, les figues sont donc toujours envoyés à Marrakech ou à Ouarzazate. C'est dommage car l'agriculture risque de rester une agriculture de subsistance, non rentable et faisant vivre de plus en plus difficilement ses gens.
ici et là, on voit toutefois apparaître des dynamiques localisées. A Aït Abdoun, à 5 kilomètres en aval de Boumalne, l'association d'agriculteurs présidée par l'instituteur du village, a recherché des financements pour construire une station électrique de pompage de l'eau et remplacer les traditionnelles canaux en terre pour de nouvelles en béton, afin de conduire l'eau aux champs sans perte. Avec l'aide de l'ORMVA, elle les a finalement reçusdes aides de l'UNESCO!
On constate une utilisation optimale des terres cultivables, ces dernières étant très rares: elles ne représentent en effet qu'1% du territoire dans la région! Le système de cultures est dominé par la céréaliculture, la culture de la luzerne, le figier et le rosier comme culture de rente.
Actuellement, les céréales occupent plus de 70% des surfaces utilisées. Elles sont le principal aliment de base de l'alimentation et assurent la sécurité alimentaire de la population en cas de sécheresse, car elles se prêtent mieux à une longue conservation. Elles sont entièrement destinées à l'autoconsommation. Les principales céréales sont le blé, l'orge et le maïs. Le blé, sur les conseils de l'ORMVA, a progressivement supplanté l'orge.
La luzerne est la seule plante fourragère pour les animaux. Toutefois l'ORMVA essaie d'introduire des plantes fourragères australiennes qui ne demandent aucun soin particulier, ni aucun arrosage.
Le maraîchage concerne de très petites surfaces et est destiné à l'autoconsommation. La fève constitue la principale légumineuse alimentaire. La pomme de terre connaît un grand essor, en raison de sa productivité à l'hectare et de sa consommation aisée.
L'arboriculture est extensive, très diversifiée et variante le long de la vallée. Sa production est exclusivement consacrée à la vente, à un prix modique, faute de coopérative locale. En amont de Boumalne, en raison d'un climat plus frais, on trouve des pommiers et des noyers essentiellement. En aval, avec quelques degrés gagnés, on voit apparaître des palmiers dattiers! Le figuier est l'arbre de loin le plus cultivé et le fruit est séché pour une commercialisation ultérieure. Puis viennent par ordre d'importance l'olivier l'amandier et l'abricotier. On trouve aussi des pêchiers, des grenadiers, des orangers...
L'élevage se présente sous deux formes principales: l'élevage domestique, et l'élevage extensif. L'élevage domestique, essentiellement ovin et bovin, contribue de façon non négligeable au revenu des agriculteurs (en moyenne à 47%). Le nombre de moutons ne dépasse pas vingt têtes par famille. On trouve aussi dans chaque famille un âne ou un mulet destiné à aider aux travaux des champs. L'autoconsommation porte essentiellement sur les caprins et les bovins, tandis que les ovins sont généralement commercialisés. Soit le gardiennage des moutons est fait par les enfants et les vieux de la famille, autour du village, soit il est à la charge d'un berger collectif payé par les habitants du village. Le troupeau est conduit dans les environs du village, mais rentre le soir dans les étables. La taille du troupeau oscille alors entre 30 et 500 têtes.
L'élevage extensif est dominé par les espèces ovines (66%) et caprines (27%) élevées sur de vastes terrains de parcours entre l'Anti-Atlas l'hiver et le Haut-Atlas l'été. La transhumance est toujours d'actualité, car vitale pour la survie du troupeau. L'élevage extensif, en raison des effectifs élevés des troupeau et du fait qu'il constitue la seule source de revenu pour le pasteur nomade, est étroitement lié aux aléas climatiques. La vie, voire la survie de ces sociétés pastorales, dépend malheureusement de la seule clémence du ciel. Les éleveurs ont comme uniques revenus la laine de tonte (1,5 kilogrammes par an et par tête rapportant environ 15 dirhams – 1,5euro) et la vente de bétail, dont le prix est directement lié aux conditions climatiques (le prix chute en période de sécheresse, car il est alors plus difficile et plus coûteux de nourrir le bétail)
Tantôt le troupeau peut s'accroître d'une manière considérable, tantôt il peut être presque réduit à néant. Une famille a ainsi perdu l'espace d'un été plus de mille têtes de bétail à cause de la sécheresse.
Inscrivez-vous au blog
Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour
Rejoignez les 21 autres membres