IMASSINE

IMASSINE

Les differentes Tribus de la region

Les Aït Sedrate

Tribu makhzenienne dont les éléments sont très répandus et qui, probablement,

prenait ses origines de la région de Saïs. "Les Aït Sedrate furent des éléments

d’une des premières tribus mobilisées par Moulay Idriss I. Ils auraient émigré

dans le Moyen-Atlas, probablement à la chute de la dynastie Idrisside, puis dans

la vallée du Dadès où la tribu aurait été appelée par Moulay Bou Amran10,

descendant de Moulay Idriss vers le 11ème siècle. Arrivés par la vallée de Oued

El Abid sur le versant nord du Haut-Atlas, les Aït Sedrate chassèrent les Aït

Hdidou du Dadès pour s’installer à leur place en formant le groupement des Aït

Sedrate n’Ighil ou n’assaoun. Une partie de la tribu glissera ensuite vers le

sud-ouest pour occuper la confluence d’Assif n’ Dadès et d’Assif n’Imgounn en

refoulant les Mgouna vers les hautes vallées du versant sud du Haut Atlas

central. Ils fondèrent alors la communauté des Aït Sedrate n’wassif dans le

moyen Dadès.

Avec la mort de Moulay Ismaïl en 1727, les Ouled Yahia de la tribu

maâqilienne dévastèrent le Dra. Les Draoua supplièrent alors le Santon Sidi

Mendil de Tansikht afin de les libérer, celui-ci fait appelle aux Aït Sedrate et

aux Imaghrann. La palmeraie de Mezguita est ainsi placée sous la protection

des Aït Sedrate qui y installent une partie des siens.

De ce fait, la grande tribu des Aït Sedrate s’étale sur trois sections du haut

bassin du Dra : les Aït Sedrate n’Ighil formés en 1936 par 6 fractions (Aït Arbi,

Aït Idir, Aït Melouane, Aït Oudinar, Aït Ouffi et Aït Toukhsine, entièrement

installées dans une section de la vallée assez étroite, cette fraction reste plutôt

tournée vers le pastoralisme que vers l’agriculture. Les Aït Sedrate n’wassif

composés de deux grandes fractions (Aït Arba-mia et Aït Yahia) et les Aït

Sedrate du Dra en majorité des sédentaires représentés par les fractions d’Afra,

Aït Hammou ou Saïd, Tansikhte et Tighoumar.

Favorisée par cette position étalée entre les deux Atlas et par la force que lui

offre ses alliances, la tribu exploite les alpages de l’Atlas, les zones de piémont

et la partie ouest du Saghro. Elle dispute constamment la jouissance de ces

pâturages aux Aït Atta et à leur allié les Mgouna.

Les Mgouna

Les Mgouna habitaient, probablement autrefois la moyenne vallée du Dadès, où

ils étaient chassés, comme signalé plus haut, par les Aït Sedrate. On les trouve,

aujourd’hui, sur un territoire étalé sur le versant sud du Haut-Atlas central. Leur

finage épouse dans ses grandes lignes les limites du bassin versant d’Assif

n’Imgounn. La tribu est composée de 4 grandes fractions : les Aït Hmed, les Aït

Ouassif, les Aït Mraou et Aït Oussaka. Si les deux premières fractions se livrent

presque entièrement à l’agriculture, les deux dernières sont plutôt tournées vers

l’économie forestière (éleveurs, charbonniers, bûcherons…)

Relique de l’histoire, les frictions entre les Aït Sedrate et les Mgouna sont

fréquentes à cause des itinéraires de troupeau entre les terroirs d’été et ceux

d’hiver et à cause de la contiguïté des parcours dans l’Atlas et dans le Saghro.

Cette situation de conflit est probablement à l’origine de l’alliance que cherchent

les Mgouna chez les Aït Atta. La remise en application du pacte de la tadaqui lie toutes les fractions des Mgouna et celle des Aït Ouallal et les Aït Atta

qui s’y attachent au début du 19ème siècle manifeste ce souci sécuritaire (voir

paragraphe réservé à la jmaâ tribale). Ce lien est aussi manifesté par

l’ancestrale tradition du recours à l’arbitrage de la cour suprême d’Igherm

Izdern chez les Aït Atta du Saghro en cas de litige. Néanmoins, il faut voir dans

ces liens entre les deux entités une recherche de la sauvegarde d’un intérêt

mutuel : Pour les Aït Atta, le territoire des Mgouna est le passage incontournable

vers les pâturages d’été dans le Haut-Atlas, pour les Mgouna, l’exiguïté de leur

territoire et la nécessité de trouver un allié puissant contre les Aït Sedrate, les

poussent à se rapprocher des Ait Atta. Une telle alliance leur offre aussi l’accès

aux parcours d’hiver dans le Saghro. La complémentarité qui leur manquait sur

leur territoire se réalise par le biais de cette convention.

Les Imaghrann

La tribu des Imaghrann s’étale de la Tassaoute amont au nord jusqu’aux

premiers contreforts du Saghro au sud. Son territoire est donc composé de deux

terroirs naturels : le versant sud du Haut Atlas et son piémont, formé de larges

glacis appelés louta. Sur ce territoire, les Imaghrann ont comme voisins à l’Est

les Mgouna, au Sud Est, les Aït Sedrate et vers l’Ouest les Aït Ouarzazate et les

Glaoua, les Ahl Skoura au Sud et les Fetouaka au nord. Selon nos informateurs

la tribu des Imaghrann est formée des 5 grands groupements (khoms) :

Aït Igourtan, Aït Affane et Ikantouln ;

Aït Zaghar ;

Aït Witfaou ;

Aït Ougrour;

Aït Zekri, Aït Toundout et Igarnane

Les formes d’occupation de l’espace par ces groupements restent source de

beaucoup d’interrogations quant au mode de peuplement et de son organisation

spatiale. En fait, si quelques groupes occupent des vallées ou des sections de

vallées bien circonscrites (Ikantouln, Igarnane par exemple) d’autres connaissent

une dispersion sous forme d’îlots enclavés (Ichabbaken et Aït Toumerte des Aït

Zaghar par exemple).

Confiné dans un espace montagnard rude et très disséqué au nord, aride nu au

sud, la tribu des Imaghrann est constamment à la quête de nouveaux

écosystèmes complémentaires et riches. Son comportement belliqueux est

source de constantes frictions avec les tribus riveraines telles les Mgouna, les

Aït Sedrate et les Aït Atta. Ces frictions sont aussi très manifestes dans les

relations entre les différents groupements de la tribu elle-même (Aït Affane ≠

Ikantoulen ; Aït Zaghar ≠ Aït Toundoute ; Aït Zaghar ≠ Aït Zekri etc.)

La recherche des alliés et la constitution des lefs en sont la conséquence. En

fait dès le 13ème siècle les Mezguita du haut Dra ont fait appelle aux Aït Zekri

pour les protéger contre les arabes Maâqil (Ouled Yahia). Ils en sortent

vainqueurs et y en acquirent un droit de pâture sur les terres de Mezguita jusqu’à

Jbel Kissan (près d’Agdez). Les Aït Zekri se vantent pour avoir conquis des

terrains par le fusil. Aujourd’hui, dispersé entre deux communes étrangères à la

tribu (Commune d’Ighil n’Oumgoun et la commune de Skoura), le groupement

des Aït Zekri se sent affaibli.

Ce système d’organisation chez les Imaghrann trouve bien sa projection dans les

formes d’exploitation des parcours par exemple. L’émiettement que connaît le

système d’exploitation des agdals est l’un des plus complexe à concevoir.

Aucune organisation n’est conçue à l’échelle de la tribu. Les groupements

ethniques, les localités sont solennellement mis en relief et forment le cadre du

plus grand nombre d’institutions traditionnelles de gestion des ressources. Une

telle réalité est très apparente même au niveau de la vie politique du groupe.

Sur à la lisière sud de la zone de projet, on rencontre deux tribus d’inégale

importance par leur territoire et par leur poids socio-économique et

démographique. Leur situation interfère secondairement avec les objectifs du

projet, mais leur compréhension est primordiale. Il s’agit de la grande

confédération d’éleveurs Aït Atta qui, dans le temps occupait le Saghro et le

Haut Atlas jusqu’au Tadla et de la tribu des Aït Dadès très anciennement

sédentarisée dans le moyen Dadès et dont le territoire forme le passage obligé

entre les deux zones écologiques (Haut Atlas et Saghro).

Les Aït Atta :

Essentiellement formés par des nomades sanhajiens, venus probablement de la

zone du Sahara, la confédération des Aït Atta s'est cristallisée autour de l'ancêtre

prétendu Dada Atta et Sidi Abdellah B. Hsayn. Avec l’arrivée des Beni-Maqil

dans le Dra et Sijilmassa à partir du 13ème siècle, et leur poussée vers le nord, les

Aït Atta s’installaient dans le Saghro. De là commençait leur expansion vers

Dra, Tafilalet et le Haut-Atlas. La dissidence des Aït Atta, leur capacité de

semer la terreur inquiétaient les pouvoirs centraux, mais sans pour autant laisser

indifférents les sédentaires oasiens qui se voyaient contraint à signer avec eux

des pactes d'alliance (Tada) ou de protection (tayassa) et soumission. La

confédération ainsi constituée, n'est pas formée par une ethnie homogène, mais

par un ensemble de groupes qui cherchait force, fortune et puissance pour

s'accaparer des terres arables, de l'eau, des parcours ou la maîtrise des axes du

commerce caravanier. La confédération des Aït Atta est formée, selon les

historiens spécialistes, de cinq grands segments appelés "khoms".

Aït Wallal et Aït Ounir ;

Aït Wahlim ;

Aït Yazza (Aït yazza, Aït Khlifa et Aït El Fersi) ;

Aït Isfoul et Aït Alouan ;

Aït Ounebgui (Aït khebbach, Aït Oumnasf et Beni Mhammed).

La confédération s'est imposée aux autres en les protégeant ou en les assimilant.

La grande étendue que couvre son territoire, la nécessité de sa sauvegarde,

pesaient sur les relations que maintenait la confédération avec ses voisins du

Haut-Atlas et de ses confins du sud.

Ainsi dès la fin du 16ème siècle les Ait Atta ont soumis tout le sud-est du Maroc,

du Saghro jusqu’au Tadla et du Dra jusqu’au Tafilalet. L’instauration des agdals

sur les alpages du Haut Atlas central (agdal n’aït Bou Iknifen, agdal

n’Ilemchan…) nécessite l’entente avec d’autres tribus pour garantir les passages

entre le Saghro et ces agdals. C’est dans cette esprit, à mon avis, et pour faire

face à la coalition des Aït Yafelmane qu’ils ont cherché l’alliance des Mgouna et

qu’ils ont fait des incursions chez les Aït Dadès.

Ces incursions, nécessaires au maintien d’une vie de transhumant, ont

débouché sur l’installation des éléments attaouis le long du Dadès. On y compte

la fraction des Aït Ouallal autour du Souk khmis Dadès (8 douars), et celle des

Aït Ounir autour de Boumalne Dadès (10 douars), et enfin des Aït Bou Iknifen

et des Aït Yaâzza24 au nord de Msemrir à Oussoukis.

La présence de l’élément attaoui le long du Dadès et sur les contreforts de

l’Atlas, si elle favorise leur libre circulation et celle de leurs troupeaux entre les

alpages d’été dans le Haut Atlas et les parcours d’hiver dans le Saghro, entraîne

l’asphyxie économique des tribus prises en tenaille entre autre les Mgouna, les

Aït Dadès et les Aït Sedrate. Le recours à des ententes, à des alliances ou à des

arrangements devient une nécessité et non un choix.

Les Aït Dadès.

Le territoire des Aït Dadès occupe le cours moyen de Oued Dadès entre le

Centre de Boumalne et celui de Kelaât Mgouna. C’est un territoire pris en

tenaille entre les Aït Atta au Sud, à l’Est et au Nord-Est, les Aït Sedrate au Sud-

Ouest et les Mgouna au Nord.

L’espace traditionnellement reconnu comme espace de la tribu des Aït Dadès

est occupé par deux grandes fractions administratives : les Ait Hammou et

Iourtguine. Si sur le plan ethnique, les Aït Dadès forme la majorité de ses

habitants (85%), une fraction de ces habitants (15%) se rattache au grand

khoms des Aït Ouallal rattaché eux-mêmes à la grande confédération des Aït

Atta. Si aujourd’hui, on est incapable de retracer ni les circonstances ni les

conditions de l’installation des Aït Atta dans la zone, il est certain que

l’événement remonte à l’époque du grand mouvement des populations du sud

vers le nord au 16ème siècle. Selon les dires des vieux, « les nomades arrivaient

pour piller les produits agricoles et les biens des sédentaires », mais leur

installation peut être mise en relation avec l’avènement des grandes sécheresses

qu’a connu le pays. La communauté qui se reconnaît comme attaoui du Dadès

forme au total 8 grands douars autour de Sidi Bou Yahia (Souk Khmis Dadès).

Ces douars avaient certainement aussi pour mission de faciliter le passage des

nomades de la tribu attaoui et de ses alliés entre le Haut Atlas et le Saghro.

Contrairement à ses voisins, le groupement des Aït Dadès est essentiellement

formé d’agriculteurs sédentaires. L’étroitesse de ses parcours, la relative

largesse de ses terres agricoles, sa position sur l’axe routier reliant Todgha et

Dra lui confèrent une position économique stratégique de grande valeur. La

présence d’une communauté juive, assez importante sur son territoire, est

témoin de cette prospérité (301 personnes à Tilite et 195 à Aït Ouzine en 1936).

Par sa position stratégique le long de l’oued (eau) et entre les parcours d’été

dans le Haut-Atlas et ceux d’hiver dans le Saghro, le territoire du Dadès est très

convoité (passage). Les tours de garde, le caractère défensif de l’habitat et

l’interpénétration remarquée entre les éléments de la tribu des Aït Dadès et ceux

des différentes fractions des Ait Atta en sont le résultat tangible. La présence des

zaouia telle celle de Sidi Bou Yahia, Sidi Lhaj, la présence d’une grande

communauté juive, sont de véritables indicateurs de l’importance stratégique et

économique de la zone. L’implantation du siège du khalifa du Glaoui (El Haj

Omar) sur le territoire de la tribu à El Goumt, est aussi révélatrice de son

importance stratégique. Le passage par le territoire des Aït Dadès est

incontournable pour les Aït Atta, pour les Mgouna et pour les Aït Sedrate qui

estivent dans le Haut Atlas et qui hivernent dans le Saghro.

Au total, la zone du Projet, située sur un axe très fréquenté par la population

durant différentes phases de l’histoire, a connu un brassage ethnique sans égal.

Ainsi, la façon d’occuper et d’exploiter le territoire, reste dans ses grandes

lignes, très marqué par l’histoire récente et lointaine du peuplement.

 



22/07/2008
1 Poster un commentaire

Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 21 autres membres